Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

16 juin 2019

Carnet / Du parfum

carnet,note,journal,parfum,christian cottet-emard,cerruti riviera,blog littéraire de christian cottet-emard,nino cerruti,littérature et parfum,cerruti classic,parfumerie,une heure pour soi,parfums italiens,italie,venise,cigare,havane,cigares dominicains,zino davidoff

Image : Une page d'un de mes carnets

Après le cigare, le parfum est mon autre folie. Dans une parfumerie, je suis pire qu’un gosse dans un magasin de bonbons. Les souvenirs que j’identifie comme les premiers et donc les plus anciens de ma vie sont olfactifs.

Distrait et manquant de mémoire à propos de presque tout ce que la vie sociale exige que nous apprenions par cœur, deux choses ne s’effacent jamais de mon esprit : une musique et un parfum ; pour les deux il est d’ailleurs question de notes. Lorsque ma mémoire a en a besoin, c’est un parfum qui peut la restaurer si j’ai du mal à convoquer un souvenir important à inclure dans un récit.

Mon odorat me joue parfois des tours. Si je perçois une odeur inhabituelle, je ne trouve la tranquillité qu’après l’avoir identifiée. Je peux vous dire sans grande marge d’erreur si une souris s’est aventurée dans votre cuisine, ce qui n’est pas un exploit car ce rongeur sent très fort. Le mélange de certaines odeurs qui en forme une nouvelle, par exemple celle du café qui vient de passer et celle des pommes dans leur corbeille, me donne la nausée. En revanche, presque toutes les notes fumées m’ouvrent irrésistiblement l’appétit, y compris un simple feu d’herbe dans la campagne.

Les parfums que j’ai toujours aimé porter sont le plus souvent dominés par des notes boisées en hiver et florales en été. Entre ces deux tendances saisonnières, je suis attiré par l’encens et les agrumes. Je reste donc dans des accords plutôt classiques et j’ai peu de goût pour la mode actuelle de la vanille et autres sirupeuses fantaisies.

Mes critères de choix sont aussi liés à la communication des parfumeurs, ce qui laisse souvent les vendeuses perplexes. Si elles me présentent un parfum qui me plait mais dont la publicité m’indispose, je le rejette, ce qui élimine la majorité des plus connus, beaucoup faisant aujourd’hui référence à toutes les caricatures possibles de la vulgarité la plus grotesque et la plus assumée.

Par exemple, par principe, je ne porterai jamais un parfum qui fait référence au sport, même de manière indirecte, d’autant que le sport m'évoque évidemment les relents peu glamours qui accompagnent cette activité. Il suffit même que le mot sport soit gravé sur un flacon pour que je l'élimine d'office de mon choix.

Après quelques essais de jeunesse avec des fragrances certes agréables mais trop convenues, je suis resté fidèle à des parfumeurs qui communiquent assez peu voire pas du tout. Certains font même de cette discrétion une stratégie marketing efficace comme la maison de couture Ermenegildo Zegna dont les flacons se méritent, du moins en France.   



carnet,note,journal,parfum,christian cottet-emard,cerruti riviera,blog littéraire de christian cottet-emard,nino cerruti,littérature et parfum,cerruti classic,parfumerie,une heure pour soi,parfums italiens,italie,venise,ermenegildo zegnaJe me souviens ainsi d’un autre parfum italien de la gamme Nino Cerruti (Cerruti Classic) désormais introuvable, sauf peut-être sur le marché de la collection, que j’avais acquis la première fois à Venise dans les années quatre-vingt et qui m’a accompagné très longtemps. La marque se contentait de l’exposer chez certains détaillants, y compris en France, sans recours massifs à la publicité.
Je ne sais s’il a fini par disparaître à cause de cette tendance au secret si peu en phase avec l’époque clinquante et tapageuse que nous traversons.

 

carnet,note,journal,parfum,christian cottet-emard,cerruti riviera,blog littéraire de christian cottet-emard,nino cerruti,littérature et parfum,cerruti classic,parfumerie,une heure pour soi,parfums italiens,italie,venise,ermenegildo zegnaPourtant, pas plus tard qu'avant-hier vendredi, une surprise m’attendait dans une boutique sous la forme du dernier né de la marque, Cerruti Riviera, probablement une renaissance de mon si longtemps regretté Cerruti Classic. En l'essayant, le voyage dans le temps me fut si fulgurant que la vendeuse remarqua mon trouble.

Je veux voir dans ce retour aux sources inattendu un symbole de la réconciliation de deux époques de ma vie à l’occasion d’un récent et heureux événement familial.

 

 

 

28 octobre 2017

Treizième poème du bois de chauffage

bois de chauffage, forêt, campagne, jura, bois, ramures, frêne, brouette, poème, blog littéraire de christian cottet-emard, poèmes du bois de chauffage, estime-toi heureux, éditions orage lagune express, littérature, christian cottet-emard, septième poème du bois de chauffage, haut-jura, saison, automne, hiver, vent, textes sous copyright, droits réservés, notaire, poésie, grosse pierre, minéral, pierre, photographie, serrure, bricolage, rose, fleur, roses de septembre, stère, camion, benne, café, pommier, poirier, cerisier, prunier, état sauvage, lichen, tabac de sorcière, arbres fruitiers, temps, brouette, papillon, jeu de hasard,éclaircie,neige,bise,odeur,parfum,effluve

Les nuages poussés par la bise sentent la neige

 

Il arrive que quelque chose ou quelqu’un qui menacent puissent dégager une odeur particulière

 

Aujourd’hui ce n’est qu’un parfum de neige mais le bois n’est pas encore livré

 

N’y pensons plus l’éclaircie passe dans les frênes

 

Photo : éclaircie dans les frênes, chez moi

© Éditions Orage-Lagune-Express 2017

 

09 décembre 2014

Carnet / Matins sous la lampe

journal,note,billet,autobiographie,écriture de soi,prairie journal,carnet,blog littéraire de christian cottet-emard,écriture,littérature,matin,christian cottet-emard,nuit,neige,lampe,cantate saint nicolas,benjamin britten,un pedigree,patrick modiano,folio,gallimard,prix nobel de littérature,poche,jean-michel maulpoix,l'instinct de ciel,poésie/gallimard,chat,flocons,hiver,décembre,viornes,sorbier,épinette,viorne,cigare,partagas,petit bouquet,figurado,cuaba divinos,cigares cubains,toscane,stendhal,feuillage,terre mouillée,parfum,petit déjeuner,confiture de prune,marmelade d'orange,café,cafetière,pain grillé,joggeur,cycliste,route,virage,sourisDebout ce lundi matin à 5h30. La maison dans le noir. Le courant une fois rétabli au disjoncteur, je remonte allumer le feu dans la cheminée. En attendant la montée en température, j’actionne le thermostat du chauffage central au gaz pour éviter que la maison ne se refroidisse. Une fois que la cheminée a fait de belles flammes et de belles braises, j’arrête le chauffage central.

La lune roule dans les épaisseurs de nuages et nimbe d’un bleu laiteux les nappes de brouillard égoutté contre les vitres. À l’opposé, par la fenêtre du salon, je vois la fumée de la cheminée emmailloter l’ampoule orange de l’éclairage public dont le dernier réverbère du village éclaire les alentours de la maison. 

Au-delà, derrière les hautes haies de ronces, d’épinettes, de sorbiers et de viornes, règne la longue nuit de décembre. La cafetière tousse, le grille-pain claque. Petit déjeuner sous la lampe. Confiture de prune maison et marmelade d’orange et de citron. Je fume rarement avant midi, plutôt après le repas, mais je fais une exception lorsque je me lève très tôt comme ce matin. 

En grillant un petit cigare sec dehors sur le pas de la porte dans les remugles de terre mouillée et de vieux feuillages, je pense à Stendhal qui ne trouvait rien de meilleur, pour commencer la journée, qu’un Toscane bien noir et bien tassé (autrement dit le cigare le plus brutal que je connaisse) dans l’air vif du matin. À ce brûle-gueule, je préfère quand même mes petits Partagas en prélude aux coronas et doubles coronas de la journée et du soir. J’ai une fois de plus la nostalgie du Petit Bouquet, un court Figurado (c’est-à-dire en forme d’obus) qui n’est plus fabriqué, je me demande bien pourquoi. C’était un cigare gras, corsé, un peu rustique mais très goûteux que le Cuaba Divinos de même forme n’a pas remplacé.   

Je suis rassuré de constater que la lancinante mélancolie de la cinquantaine puisse être tenue en respect par les petits plaisirs du quotidien. Je n’ai vraiment pas à me plaindre du mien, à l’écart, protégé, confortable, silencieux. Un provençal dirait « on entendrait péter une souris » mais la chatte Linette ne leur en laisse pas le temps si par extraordinaire elle s’aventurent dans les parages.

En revanche, quand le renard vient renifler autour de la deuxième voiture qui couche dehors, ainsi que je l’ai surpris l’autre soir, Linette se carapate dans son passage secret et vient se réfugier dans mes jambes en grondant de colère et de frayeur. Elle produit le même son dès qu’elle aperçoit un joggeur ou un cycliste dans le virage en perspective directe de son poste de guet, le fauteuil en rotin devant la baie vitrée, ce que je comprends parfaitement. Linette est la plus grognonne et la plus peureuse des chattes que je connaisse, ce qui l’aidera peut-être à vivre plus longtemps que Tigrette, la précédente, qui aimait trop la vie, jusqu’à la témérité, et qui n’a vécu que dix mois, probablement percutée par une voiture.

Écoute matinale de la Cantate Saint Nicolas de Benjamin Britten. Les passages avec la voix d'enfant soliste me rappellent mes quelques prestations de chant en soliste lorsque j'étais à l'école primaire mais je n'avais pas la chance de chanter du Britten.

Bois à rentrer, relecture, corrections de pages récentes, lecture de Un pedigree de Patrick Modiano et de proses poétiques de Jean-Michel Maulpoix (L’instinct de ciel, Poésie/Gallimard). Un sandwich et un verre de vin à midi. Une journée feutrée de plus ou de moins, comme on voudra et puis, cette nuit (déjà le matin, 1h45), la première neige qui n’a pas le même parfum que les suivantes. 

Il existe sûrement une explication à cela mais je me rends bien compte que je suis arrivé à une période de ma vie où il me paraît vain et futile de chercher des explications.

Photo : Chez moi lundi matin