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18 octobre 2014

Carnet / Du voyage

Les clochettes des vaches tintent dans la nuit derrière la fenêtre de mon bureau. Ce soir, j’ai encore manqué l’occasion de me coucher un peu plus tôt. Je suis comme les enfants, je n’arrive pas à me résoudre à aller au lit. Je suis tourmenté par des envies de sucre et de tabac. Si je cède à la tentation d’une friandise sucrée, je sais que j’enchaînerai avec un cigare. J’en ai fumé plusieurs dans la journée, il ne faut pas exagérer...

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C’est en veillant que je pense le plus au voyage. Je suis pourtant très casanier. Je ne voyage pas pour découvrir d’autres cultures, j’ai déjà encore assez à apprendre de la mienne, la culture occidentale. En voyage, je ne cherche pas spécialement le contact avec les gens du pays que je visite, ce qui ne m’empêche pas d’apprécier la gentillesse et la courtoisie qu’on trouve beaucoup plus à l’étranger qu’en France.

À l’étranger, j’aime loger dans des hôtels confortables et anonymes avec des petits déjeuners copieux et standards. Mes pays de prédilection sont l’Italie et le Portugal. Je connais bien la Belgique où j'ai de la famille et où je passais mes vacances d'été lorsque j'étais enfant. La première fois que j'ai vu la mer, c'était la mer du Nord (Ostende, Coxyde, Knokke-Le Zoute).

Ces deux dernières années, j’ai privilégié Lisbonne comme destination. Je ne peux voyager que dans des contrées et des villes où je me sens en sécurité, ce qui exclut un ou deux continents et un grand nombre de pays où je n’ai aucune intention de mettre les pieds de toute ma vie. Les vrais voyageurs à l’esprit aventureux et las de l’Occident me considèrent comme un rigolo, un touriste. C’est précisément ce que je suis et je n’en éprouve aucune honte.

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Pour moi, le voyage, c’est me retrouver à dix heures du matin à Lisbonne en train de fumer un cigare et de boire un café au soleil pendant que les gens de mon Jura entendent crépiter la toile de leur parapluie sous l’averse. Dix heures du matin dans une grande ville étrangère, de préférence du sud de l’Europe, est pour moi le temps du voyage, son heure magique, le moment où je me retrouve moi-même, où je ne suis plus en pilote automatique, où je bénéficie d’une sorte d’immunité diplomatique, où rien d’autre ne me concerne que la disponibilité à l’air du temps, où en tant qu’étranger je ne suis responsable de rien, hors de l’Histoire, essentiellement occupé à des futilités, à flâner, à voir, à rêver éveillé, à m’intéresser à ce qui n’intéresse personne, à faire de menus achats, à photographier un tramway à Lisbonne et un vaporetto à Venise.

Ce que je sais dans ces moments légers, c’est qu’au retour, une fois chez moi en attente dans la nuit de ma campagne jurassienne comme à un arrêt ou à une station fantômes, ce tramway et ce vaporetto reviendront me chercher à ma porte, comme s’ils surgissaient en lisière des forêts d’épicéas où, derrière ma fenêtre, tintent les clochettes des troupeaux.

Photos : Lisbonne, tramway dans le soir humide. Venise, vaporetto sous le pont Rialto. (Photos © Christian Cottet-Emard) 

11 octobre 2014

Carnet / Des menus plaisirs et de l’insomnie tranquille

Après quelques achats futiles mais bien agréables dans la journée, dîner au lac Genin. La même ambiance apaisante et chaleureuse depuis plus de quarante ans que je fréquente cette auberge en pleine forêt.

Lac invisible sous le brouillard. Un petit havane en sortant sous les grands épicéas dont l’enseigne de l’auberge éclaire les perles de pluie. Un Por Larrañaga plus conséquent et plus corsé accompagné d’un vieux Calvados une fois rentré à la maison.

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Commencé un nouveau carnet bleu acheté récemment à Lisbonne. 

Lecture de quelques poèmes français de Pessoa dans l’édition parue le 25 septembre dernier que j’ai reçue en service de presse de la part des éditions de la Différence (j’en donnerai prochainement un article).

Ultimes réglages dans la composition de mon prochain recueil de nouvelles. Il s’agit de textes assez grand public, d’un registre  sentimental, auxquels j’hésite depuis des semaines à ajouter une nouvelle s’intégrant dans le thème mais d’un ton résolument plus cru, plus érotique si l’on préfère. Je la disposerai finalement au milieu du recueil afin de ménager une rupture de rythme sans pour autant m’écarter du thème principal. Mon ami Jean-Jacques Nuel, éditeur de deux de mes livres, pense que c’est une bonne solution.

Un peu de musique avant d’aller dormir : L’ouverture tragique de Brahms.

La chatte Linette avait envie de se faire cajoler un peu en s’installant sur mes genoux mais le seul fait de bouger pour régler le son du casque l’a dérangée. Dans ces cas-là, elle manifeste son agacement en mordillant sans faire mal, en bondissant sur le fauteuil d’à côté et en me fixant d’un air réprobateur. Dehors, elle a capturé une souris qui s’est cachée si longtemps dans un recoin inaccessible du salon qu’elle a fini par l’oublier. J’ai dû enfiler un gant en cuir épais pour attraper la souris et la libérer dans la haie en prenant bien garde que Linette ne s’aperçoive pas de mon manège sous peine de perdre sa confiance. Linette a un caractère ombrageux.

Gargouillis des gouttières sous l’averse nocturne. Glapissements du renard dont le passage a déclenché l’éclairage automatique. L’esprit un peu plus léger que d’habitude mais encore pas réussi à me coucher plus tôt.

06 octobre 2014

Où j'étais tout récemment et où je retourne cette nuit en rêve...

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Photos © Christian Cottet-Emard, 2014