11 avril 2019
Un vieux texte
En feuilletant mon premier recueil publié en 1979, je me suis arrêté sur ce vieux texte écrit voici tout juste quarante ans !

Après le petit déjeuner, il vaut toujours mieux rincer abondamment le bol dans lequel tous les espoirs du matin miroitent, surtout si l’on est coutumier des nuits blanches.
Ces reflets mordorés qui clapotent dans le café au lait sont en effet tenaces et leur accumulation laisse tout au long du jour, si l’on n’y prend garde, un souvenir amer et vague, une nostalgie poignante à la longue impossible à récurer.
L’imprudent qui oublie volontairement ou pas de s’astreindre à cette détestable mais utile petite besogne se voit vite envahi par toute une batterie de cuisine de rêveries qu’il demeure alors vain de vouloir laver puisque le dépôt quotidien d’illusion vespérale et d’espérance matinale a fini par former une sorte de ciment plus dur et plus scintillant que le diamant le plus pur.
Tout nettoyage tardif reste donc dérisoire et il faut alors accepter l’idée de vivre dans une somptueuse mélancolie, comme le font de nombreux noctambules et de nombreux poètes.
01:26 Publié dans Et à part ça ? | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : demi-songes, plaquette, recueil, paragraphes littéraires de paris, premier recueil, petit déjeuner, 1979, année de mes vingt ans, année 1979, bol, café, cafetière italienne, batterie de cuisine, matin, nuits blanches, espoirs, reflets, noctambules, édition, publication, livre, poèmes, poésie, poème en prose, première publication, débuts en écriture, débuts littéraires
11 novembre 2018
La bonne étoile
Tu regardes toujours à la fenêtre avant de te coucher car ce que tu vois dehors dans le halo du dernier réverbère est ta vie
Dans ce tableau nocturne le pré quelques buissons l’orme les frênes le chat la route où trotte parfois presque tranquille le renard
Pas grand-chose en somme mais tout ce dont pouvait sans doute rêver le pauvre gars dans les tranchées
Quelle chance fut la tienne de n’être pas ce pauvre gars
Ce clair de lune encadré par la fenêtre quel luxe
Cette fenêtre entre toi et le monde quelle chance
(Extrait de mon dernier livre, Poèmes du bois de chauffage, section La Lune du matin et autres récits de l'homme invisible, éditions Germes de barbarie.) Pour Oyonnax et sa région, livre disponible à la librairie maison de presse Mille Feuilles, rue Anatole France.
Photo : Depuis ma fenêtre (photo CC-E)
00:43 Publié dans Estime-toi heureux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poèmes du bois de chauffage, la lune du matin, et autres récits de l'homme invisible, christian cottet-emard, éditions germes de barbarie, littérature, récits, poèmes, 11 novembre, évocation, tranchées, guerre de 14-18, grande guerre, première guerre mondiale, librairie maison de presse mille feuilles, oyonnax, ain, rhône-alpes auvergne, france, europe, blog littéraire de christian cottet-emard
02 avril 2016
Carnet / De la route qui s’éloigne dans le reflet d'une vitre
Avant hier, premier pissenlit. Content de le voir. Hier, la maison qui semblait flotter au milieu des frênes dans le silence du brouillard. Mésanges et moineaux perplexes.
Je lis beaucoup de réactions au grand départ de Jim Harrison. J’aime ses poèmes (Une heure de jour en moins, éd. Flammarion) très narratifs, généreux, sinueux, tour à tour fragiles et puissants, capricieux comme le cours des rivières où il traînait ses bottes dans le clapotis des berges froides. Moins concerné par ses romans. Le livre en prose que je préfère est son autobiographie En marge (éd. 10/18). J’avais aussi relevé cette remarque dans sa nouvelle La bête que dieu oublia d’inventer extraite du recueil En route vers l’ouest (éd. 10/18) : « Rien ne tourmente davantage un vieux chnoque que la pensée de la vie non vécue. »
Il est normal que ce constat m’assaille parfois à cinquante-sept ans mais curieusement, j’éprouvais cette angoisse dès mon adolescence. Peut-être étais-je déjà un vieux chnoque à cette époque ? Je suis souvent tenaillé par ce sentiment de vie non vécue.
J’ai certes fait le choix de la sécurité en bien des domaines mais au fond, que signifie une vie vécue ? Un engagement intense dans la société, dans la politique, dans le travail, dans l’humanitaire, au Sou des écoles ? Ce n’est pas dans mon tempérament et de plus, je n’ai aucune des compétences techniques et relationnelles requises pour être efficace dans les tâches que cela implique. Quant à la seule vague compétence dont je peux me hasarder à témoigner en prenant le risque de me faire moquer (écrire), elle court les rues et la société n’en a nul besoin.
Aussi puis-je m’estimer heureux, bien installé, de voir tranquillement s’éloigner, comme dans le reflet d'une vitre de train ou dans le rétroviseur d’une auto silencieuse et confortable, la route et le paysage où je n’ai marqué d’autre empreinte que celle, inutile et fugace, de mon regard distrait.
Photo : Porto, métro (photo CC-E)
03:05 Publié dans carnet | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : carnet, note, journal, autobiographie, prairie journal, écriture de soi, blog littéraire de christian cottet-emard, pissenlit, brouillard, rivière, berge, jim harrison, en marge, éditions 1018, une heure de jour en moins, poèmes, flammarion, en route vers l'ouest, 1018, la bête que dieu oublia d'inventer, nouvelle, mésange, moineau, adolescence, vieux chnoque, rétroviseur



























